Bienvenue à tous ceux qui aiment lire ...

Lire, pour moi, c'est échapper au quotidien tout en restant proche des hommes et de leurs réalités ...

lundi 20 décembre 2010

Comment (bien) rater ses vacances d'Anne Percin

Editions du Rouergue, couv. Dorothy-Shoes, coll. Doado, 185 p., 11€50
A 17 ans, Maxime refuse de passer ses vacances avec ses parents. Il restera à Paris avec sa grand-mère pendant que ses parents randonneront sur le GR corse.
Hélas, rien ne va se passer comme prévu et les mésaventures vont s'accumuler !
Le roman rappelle fort judicieusement aux ados qu'il n'est pas facile de devenir un adulte au quotidien et de faire face à toutes les situations sans l'aide de papa-maman (en l'occurrence injoignables).
Anne Percin cultive le mot juste et le trait d'humour. Un cocktail fort réussi : j'ai ri du début à la fin.
Voilà un extrait pour vous donner une petite idée de la chose :
" Chers parents,
Mon stage de survie en milieu hostile se passe bien, merci. J'espère que vous n'êtes pas trop morts, rapport aux frais de rapatriement qui doivent coûter bonbon, depuis la Corse. Heureusement, j'ai l'eau-de-vie de Mamie, ça m'aide pour tenir. Si jamais vous ne reveniez pas, ce serait sympa de m'envoyer un mandat parce que la prostitution masculine, ça marche pas trop dans le quartier. Bon, ben je vous laisse, c'est l'heure de ma piqûre d'héroïne.
Gros bisous, votre fils bien-aimé,
Maxime."
Le texte regorge de références musicales que les ados apprécieront et pour les autres, voilà une occasion de (re)découvrir des "incontournables"  ;o)
3e et lycée
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La belle Adèle de Marie Desplechin

Gallimard Jeunesse, couv. Lucie Durbiano, 2010, 154 p. , 8€50
On est plus heureux quand on ressemble aux autres. En tout cas, c'est ce que pensent Adèle et Frédéric, deux copains d'enfance. Or aucun des deux ne se fond dans la masse des collégiens : Adèle s'habille à la va comme j'te pousse et Frédéric plane intellectuellement trop loin au-dessus de ses camarades de classe. Impardonnables.
Pour que les autres ne les regardent plus comme des bêtes curieuses, ils unissent leurs différences et ... font croire qu'ils sortent ensemble. Ils comptent impressionner ainsi leurs camarades. Mais un grain de sable va gripper la machine !
Beaucoup d'humour dans ce petit roman sympathique qui illustre bien le monde du collège et qui défend un principe simple mais fondamental : quand on veut quelque chose, il faut se remuer pour l'obtenir !
Bien pour les 5e/4e qui perdent leur spontanéité face au regard des autres ...
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dimanche 19 décembre 2010

Walking Dead de Charlie Adlard et Robert Kirkman (et Tony Moore)

BD, Delcourt, 2007, 142 p., 13€
série en 12 tomes, illustrations en noir et blanc
Des films de zombies, le scénariste de Walking dead, Robert Kirkman dit : "Les bons films de zombies nous révèlent à quel point nous pouvons être déséquilibrés ... ainsi que la situation de détresse dans laquelle se trouve notre société aujourd'hui. Bien sûr, ils amènent également leur dose de gore, de violence ... Mais il y a toujours en arrière-plan cette critique sociale." La tendance générale de la BD est donnée.
Le héros, Rick Grimes, flic de son métier, sort du coma après avoir été blessé lors d'une opération. Il découvre, horrifié, un monde totalement transformé : les humains ont été contaminés et sont devenus des zombies. Il part sur les routes, à la recherche de sa femme et de son fils ...
Kirkman nous montre comment Rick, flic lambda, s'adapte à ce nouveau monde, en usant de violence mais en se posant toujours la question de son humanité. Comment il devient leader en protégeant et en accueillant pacifiquement les nouveaux venus parce qu'il a remarqué "qu'en groupe, on s'en sort mieux".
Rick prend conscience que les circonstances le changent profondément mais il veut désespérément garder ses valeurs : solidarité, honnêteté et humanité.
Une magnifique bande dessinée, loin des clichés du gore (même si la violence est présente) et servie par le très beau dessin de Charlie Adlard ... Le cadeau de Noël !
A partir de la 3e
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dimanche 12 décembre 2010

Le dernier jour d'un condamné de Victor Hugo

Librio, 2006, 97 p., 2€
Accrochez vous, c'est du lourd ;o)
Tout le monde a entendu parler du combat de Victor Hugo contre la peine de mort. Il met dans ce récit (comme dans "Claude Gueux", à lire aussi) toute la force de sa conviction et de son humanité.
Un jeune condamné à mort raconte, à la première personne, les jours et les heures qui précèdent son exécution. Victor Hugo s'en tient aux faits, aux choses, aux lieux pour faire ressentir la souffrance qu'inflige ce traitement barbare. Rien ne nous est évité, ni la panique ni la révolte du pauvre homme et pourtant, pas d'outrance, pas de pathos. Avec son style, inégalable.
Une leçon de simplicité et de dignité à une époque où le déballage des sentiments en public (par la télé réalité) a quelque chose d'écœurant.
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Chien blanc de Romain Gary

En 1968, Romain Gary vit à Beverley Hills, avec Jean Seberg. Aux États Unis, la ségrégation raciale a encore cours. Un beau matin, il trouve un chien devant sa porte, un berger allemand déjà âgé. Le chien insiste pour entrer ... Gary l'adopte. Très rapidement, il se rend compte que l'animal a été spécialement dressé pour attaquer les noirs. Choqué qu'un animal puisse payer le prix de la folie des hommes, il l'emmène dans un chenil où un dresseur "génial" (un noir, bien sûr) doit le rendre inoffensif.
Le roman est à la fois une "analyse" à la Romain Gary de la ségrégation raciale aux États Unis et un long cri de révolte contre la cruauté et la bêtise humaine.
On finit par se demander où est la part de vérité et où est la part de fiction, tant le récit semble par moment cousu sur mesure pour donner à Romain Gary l'occasion d'exposer sa pensée profonde d'individualiste forte tête et grande gueule. Mais c'est justement là qu'agit le charme et qu'on se laisse totalement emporter par le récit et les propos parfois hilarants malgré le sérieux du sujet.
Totalement amoureux de sa femme, il est scandalisé de la voir exploitée financièrement par des groupuscules pro-noirs souvent manipulés par le FBI : Gary n'est l'homme d'aucune idéologie, d'aucun parti. A part De Gaulle, il ne respecte que l'être humain ... pour qui il reste tant à faire.
"Je ne suis pas découragé. Mais mon amour excessif de la vie rend mes rapports avec elle très difficiles, comme il est difficile d'aimer une femme que l'on ne peut ni aider, ni changer, ni quitter ..."
Romain Gary, le trop humain.
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Mourir de dire La honte de Boris Cyrulnik

Editions Odile Jacob, 2010, 260 p., 22,50€
Merci à Boris Cyrulnik de savoir exprimer simplement des notions complexes et de permettre à ses lecteurs de mieux comprendre ainsi ce qui les touche ! Mais comme il est difficile de parler de ce livre foisonnant et complet ... Je vous livre, en vrac, ce qui m'a interpelée : 
La honte provient du regard de l'autre et de l'interprétation que nous en faisons. Le sentiment de honte dépend entièrement de l'époque, du lieu de vie et du milieu où l'on vit. Un acte condamné à une époque devient, un siècle plus tard, signe d'émancipation et de liberté et nous en sommes fiers !
Figurez vous que nous ne sommes pas égaux biologiquement devant les sentiments. Et oui, les "petits transporteurs" de sérotonine sont moins entreprenants, plus timides et socialement moins appréciés que les "gros transporteurs", moins réceptifs aux sentiments négatifs. Cependant, un environnement affectif sécurisant rendra un "petit transporteur" actif et lui permettra de se développer de façon fort satisfaisante ... et l'on revient à l'importance fondamentale du milieu !
L'auteur évoque, entre autres, la déportation et rappelle que, quand certains déportés ont été déshumanisés, d'autres, en développant la solidarité et le dialogue entre eux, ont pu donner du sens à leur détention et garder leur dignité d'homme sans ressentir de honte. Ainsi Germaine Tillion qui a appliqué ses méthodes d'ethnologue pour comprendre le fonctionnement d'Auschwitz et l'expliquer à ses camarades de détention ou les communistes qui se sont organisés.
Boris Cyrulnik donne beaucoup d'exemples pour éclairer son discours et il nous permet ainsi de mieux comprendre le mécanisme de la honte. La honte ? Un sentiment qui n'est pas toujours négatif puisqu'il peut, parfois, nous rendre plus humain, précise-t-il !
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mercredi 8 décembre 2010

Les enquêtes d'Enola Holmes (La double disparition) de Nancy Springer

Nathan,  couv. Raphaël Gauthey, 2007, 249 p., en poche 6.20€
Il s'agit du premier tome de la série qui en comprend maintenant 5.
La mère d’Enola, 14 ans, disparaît mystérieusement le jour de l’anniversaire de sa fille. Ses grands frères, Mycroft et Sherlock, décident de l’envoyer, contre sa volonté, dans un pensionnat. Mais trop indépendante pour subir l’enseignement des « bonnes manières victoriennes », Enola s’enfuit à Londres où elle mène l’enquête pour retrouver sa mère …
Le récit est captivant, tout s’enchaîne sans temps mort et, au-delà de l’enquête policière, c’est la description de l’époque victorienne vécue du côté des femmes qui est passionnante : l’absence totale de droits, le poids des conventions, la pruderie, les jugements masculins négatifs tendant à les rabaisser. 
Moi il me semble important de montrer aux filles que les droits dont elles profitent aujourd'hui n'ont pas toujours existé et qu'il a fallu des pionnières pour se battre et les obtenir ! La liberté se conquiert ;o)
C'est ce qui fait l'intérêt premier du roman ; par ailleurs, l’héroïne développe des qualités qui font indubitablement penser à celles de son illustre frère : don d’observation et de déduction logique, goût du déguisement mais aussi caractère indépendant et fierté.
Enola initiera ses lecteurs au monde de Sir Arthur Conan Doyle en leur donnant peut-être envie d’aller voir du côté de Sherlock, le vrai …
Certains mots relèvent d’un vocabulaire vieillot, ils concernent essentiellement la description des vêtements ; quelques renvois en bas de page auraient été bien venus. Le roman s'adresse donc plutôt à de bons lecteurs, à partir de la 4e/3e ... j'ai écrit ça hier, sauf qu'aujourd'hui, une petite élève de 6e m'a dit, avec une expression gourmande, qu'elle avait lu toute la série ;o))
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samedi 4 décembre 2010

Le secret d'EndYmiOn Spring de Matthew Skelton

Pocket Jeunesse, couv. Bill Sanderson, 397 pages, 2006, 19€
Une grosse crise de flemme m'a momentanément éloignée de la lecture et je reviens, en douceur, avec une bonne petite histoire de magie et de dragon qui tourne autour de la recherche du "livre ultime" ... vous savez, celui qui donne le pouvoir de voir l'avenir et le passé et donc, tous les pouvoirs ;o)
Deux récits alternent et s'imbriquent, celui de Blake qui vit de nos jours à Oxford avec sa chercheuse de mère et sa petite soeur et celui d'Endymion Spring qui vit au 15e siècle, à Mayence. Ce dernier a été recueilli et sorti de la misère par Johannes Gutenberg, en pleine invention de l'imprimerie. Endymion, muet de naissance, devient son apprenti typographe et se révèle extrêmement doué pour le métier. 
Les deux enfants ont été choisis pour leur pureté et devront, chacun à leur époque, protéger le "livre ultime" des personnes mal intentionnées et avides de pouvoir qui pullulent parmi les adultes.
Il s'agit, vous l'avez compris, d'une histoire assez manichéenne mais, curieusement, très documentée sur la bibliothèque bodléienne d'Oxford et sur le 15e siècle. Il en résulte une ambiance moyenâgeuse, sombre et convaincante qui fait heureusement passer le style, pas exceptionnel, au second plan.
Un gros roman qui se lit facilement, vraiment pour les fanas de dragons vu son prix ...
 A partir de 13 ans
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mercredi 17 novembre 2010

Celle que je ne suis pas de Vanyda

Bande dessinée éditée chez Dargaud, 2010, 192 p., 14€
"Celle que je ne suis pas" vous ramènera quelques années en arrière si vous êtes devenu cette incompréhensible bestiole qu'est un adulte ou vous plongera dans le présent si vous êtes encore dans la période incertaine de l'adolescence.
La BD campe en noir et blanc le petit monde du collège, vu par des élèves de 3e. L'héroïne, Valentine, a bien du mal à s'affirmer auprès de ses copines, des garçons, de ses profs et de sa mère. Introvertie, le regard des autres pèse lourd sur elle et l'empêche souvent de suivre son propre mouvement.
Les situations sont vues avec finesse, l'ambiance "collège" est bien rendue, le quotidien des élèves réaliste, jusqu'à leur langage parfois très fleuri (mais jamais choquant).
Et si vous avez plus de 14 ans, rassurez vous, vous constaterez que les affres de l'adolescence n'ont pas changé depuis votre époque !
Testée par plusieurs élèves bons et moyens lecteurs, elle a été très appréciée et a réussi l'examen de passage : ils réclament la suite ...
à partir de 12 ans
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Aimez-vous Brahms de Françoise Sagan

Le livre de poche, 1982, 179 p.
En rangeant les rayonnages de mon CDI, j'ai été surprise de tomber sur ce roman peu approprié aux ados du collège mais ne l'ayant jamais lu, je me le suis emprunté ;o)
Paule, 39 ans, est une femme élégante et indépendante. Elle aime Roger, homme d'affaires, égoïste et coureur de jupons qui la rend malheureuse. Son travail de décoratrice l'amène chez une riche parisienne où elle fait la connaissance du fils, Simon, étudiant en droit très jeune, très beau et très paresseux. Paule fascine Simon qui, après l'avoir emmenée à un concert de Brahms, décide de la conquérir : "J'ai le droit de parler, j'ai le droit de tomber amoureux de vous et de vous prendre à lui, si je peux.
Déjà elle était dehors. Il se leva et se rassit, la tête dans les mains.
Il me la faut, pensait-il, il me la faut ... sinon je vais souffrir."

Histoire d'amour éternelle, intemporelle où les sentiments parfois confus et contradictoires mènent le jeu : Paule aime, malgré elle, celui qui la fait souffrir et la passion de Simon ne fera pas le poids ... L'amour fait mal nous dit F.Sagan mais doit on le refuser ?  D'autant plus qu'on nait et qu'on reste seul ... Pas très gai le roman mais intéressant par la double image de la femme qu'il donne : indépendante car elle décide pour elle-même mais  dépendante "idéologiquement" et affectivement. En effet, Paule choisit Roger parce qu'il incarne la maturité donc la sécurité et la réussite sociale et qu'il a, malgré tout, besoin d'elle.
A-t-on beaucoup évolué depuis 1959, date de la parution du roman ?
J'ai largement préféré "Aimez-vous Brahms" à "Bonjour tristesse" que j'ai relu l'an dernier et que j'avais trouvé un peu glauque.
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jeudi 11 novembre 2010

La forêt des damnés de Carrie Ryan

 Gallimard Jeunesse, couv. Alain Barreau, 2010, 381 p., 15.50€
Notre monde a été infecté par un virus qui transforme les humains en zombie. Mary vit dans un village entièrement entouré de grillages qui protègent les survivants. Totalement isolé de l'extérieur, il est régi par une poignée de religieuses (les Soeurs) qui imposent à tous des pratiques visant à protéger et sauver l'espèce humaine mais ne laissant aucune liberté individuelle.
Mary étouffe. Elle n'arrive plus à croire en un Dieu qui aurait installé ce monde horrible, elle veut aimer librement et rêve de partir à la recherche de l'océan, souvenir de l'ancien monde que lui a transmis sa mère ... Existe-t-il un endroit où on peut encore vivre à l'abri des zombies, reste-t-il d'autres humains quelque part, vivent ils aussi sous l'emprise de la religion, doit on suivre ses rêves coûte que coûte ?

Le récit rassemble les ingrédients du genre cinématographique : récit haletant, beaucoup d'action, beaucoup de sang mais aussi critique de société ! Et là, ça devient bigrement intéressant : qu'est ce qu'une société sans mémoire (il n'y a plus de livres, plus de photos, plus d'archives), à quoi mène une société puritaine où tous doivent penser de la même façon ... Un questionnement qui tombe peut être à pic pour l'Amérique d'aujourd'hui !
La problématique n'est donc pas celle des films de zombie à la Romero
(la différence, qu'est ce que l'humanité ?) mais elle réussit à accrocher le lecteur : oui se battre pour ses rêves rend plus fort, oui résister même si on est seul rend plus fort.
Carrie Ryan fait la démonstration que le genre "zombie" peut faire recette
en littérature !
Impossible de poser le livre tant qu'il n'a pas été fini !
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A partir de 14/15 ans.

samedi 6 novembre 2010

Parle leur de batailles, de rois et d'éléphants de Mathias Enard

Actes Sud, couv. Sygma / Corbis, 2010, 17€,
Sans aucun doute un bon roman, documenté et bien écrit mais qui m'a laissée sur le bord de la route ! Je n'ai pas été emportée par l'histoire de Michel Ange, invité par le sultan Bajazet à Constantinople en 1506 pour y construire un pont sur la Corne d'Or. Les thèmes développés y sont toujours actuels : rivalité occident / orient, liberté de création de l'artiste, liberté de pensée, omniprésence de la religion  ...
Malgré une réflexion intéressante et le beau style de Mathias Enard, aucun des personnages du roman ne m'a émue et le récit ne m'a jamais fait vibrer. Trop intello ?
Je viens d'apprendre que ce roman a eu le prix Goncourt des Lycéens ! J'achète en général les romans lauréats et bien, j'étais juste en avance, grâce à mon fils Olivier ;o) 
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Rosa candida d'Audur Ava Olafsdottir

Editions Zulma, couv. David Pearson, 2010, 332 p., 20€
Voilà un joli roman islandais dont le jeune héros grandit sous nos yeux et se construit, sans prétention, une petite philosophie de la vie bien ficelée, à utiliser en toutes circonstances et sans modération ...
C'est qu'il est bien jeune, avec à peine son bac en poche, pour avoir un bébé conçu avec une quasi-inconnue ! La vie ne l'a pas épargné : sa mère vient de mourir dans un accident de voiture, son frère jumeau est autiste, son père, un rugueux électricien, déprime. Et lui ne sait que faire de sa vie …

Son amour du jardinage et particulièrement des roses (dans une nature pourtant hostile), légué par une mère à la main verte et à la personnalité attachante, vont l'expédier vers un jardin monastique où ce grand échalas roux cherche candidement conseils et aide auprès d'un vieux moine cinéphile et … amateur d'alcool. L'arrivée imprévue de son bébé lui permet de s'intégrer au village et de donner sens à sa vie.



On sourit souvent en lisant ce petit bijou d'humour décalé, les préoccupations de son héros bien terre à terre s'élèvent souvent à l'universel en passant par des chemins déconcertants mais finement observés. Et de son entourage religieux, il retire que le sacré surgit tout seul du quotidien sans avoir besoin de croire en Dieu. Car les miracles se trouvent dans ce quotidien tout simple : c'est sa petite fille qui par sa bonne humeur et sa tendresse guérit la voisine de sa dépression, c'est le jardin de l'abbaye qui, grâce à ses soins, devient un lieu de rencontre entre les habitants, c'est la solidarité entre les hommes …

Offrez à Noël ce roman qui fait chaud au cœur !!! @@@@@

Retour aux mots sauvages de Thierry Beinstingel

Fayard, coll. Roman, 2010, 19€, 294 p.
Travaillant pour une grosse entreprise de télécommunications, après une énième restructuration, « Eric » (prénom d'emprunt pour le travail) passe du service câblage au standard téléphonique. Cet homme habitué au travail manuel doit dorénavant jongler avec des mots et des sons assemblés par d'autres. Dans une grande salle commune, il doit répondre à des clients immatériels dont il ne saura jamais rien, en suivant des consignes strictes, subissant la pression des objectifs de vente à atteindre …Comme tant d'autres, cette déshumanisation du travail le rend invisible et solitaire.

La dépression guette et son cortège de souffrances mais l'instinct de conservation sera le plus fort chez Eric. Cela n'a pas été le cas, nous le savons hélas, pour tous les employés de France Télécom ...

« Retour aux mots sauvages » est un livre aussi surprenant qu'indispensable. J'ai mis du temps pour rentrer dans l'histoire car les faits mènent le roman. Les sentiments n'en surgissent que lentement, la souffrance sourd doucement.
C'est une lecture forte, qui ne laisse pas indifférent et qui nous amène inexorablement à la terrible constatation que « un employé heureux est plus performant, un salarié malheureux ne crée pas de valeur : phrases réelles, publiées lors des tristes événements, autant de preuves d'un totalitarisme entièrement dévoué au profit, corps et âme ». Totalitarisme économique dont nous sommes tous les victimes ...
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dimanche 17 octobre 2010

Seule Venise de Claudie Gallay

 Babel, couv. Gary Isaacs, 301 p., 8,50€
 Après une rupture sentimentale douloureuse, l'héroïne vide son compte en banque et part à Venise dans une petite pension de famille.
Murée dans un chagrin silencieux, se laissant imprégner par l'ambiance de la ville, elle va rencontrer plusieurs personnages aussi désenchantés qu'elle. Un vieux prince russe fantasque et perspicace, un libraire juif, une jeune danseuse passionnée lui redonneront petit à petit goût à la vie ... Chacun des personnages suit son destin en aidant les autres à sa façon et c'est ce qui m'a le plus touchée dans l'histoire.
La beauté du roman réside dans le style de Claudie Gallay, tout en finesse, en retenue et en simplicité, suggérant les sentiments complexes plutôt que les décrivant. On ne peut s'empêcher de penser qu'il y a quelque chose de l'auteur dans la retenue de cette héroïne si sensible !
Mais pourquoi Venise ? Le prince nous en donne la raison, "parce que seule Venise me console de ce que je suis vraiment". 
Un bonheur de lecture.
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vendredi 15 octobre 2010

La forêt interdite de Matt Haig

Bayard Jeunesse, couv. Benjamin Bachelier, 2010, 12€90
Les parents de Samuel et Martha meurent accidentellement et les enfants doivent aller vivre chez leur tante Eda en Norvège. Martha refuse de parler depuis l'accident et Samuel n'a pas envie de rester en Norvège, d'autant plus que leur tante habite dans un coin perdu, à la lisière d'une sombre forêt où elle leur a formellement interdit d'aller. Bien sûr, tous deux s'y rendront, découvriront un monde dangereux peuplé de trolls, de sorcières, de gubbins chanteurs, de huldres, tous tyrannisés par le cruel métamorphoseur ! Les enfants, aidés de leur tante et de quelques créatures bienfaisantes, chercheront à rendre la liberté au peuple de la forêt ...
Un joli petit roman, bien ficelé, haletant, aux personnages sympathiques. Pour les ados amateurs de fantasy !
à partir de 12 ans (402 pages).
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mercredi 13 octobre 2010

Elle s'appelait Sarah de Tatiana de Rosnay

couv. Ouka Leele / Agence Vu, Le livre de poche, 2007, 6.95€
Julia Jarmond est une journaliste américaine, mariée à un parisien. A l'occasion de la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv du 17 juillet 1942, elle doit écrire un article. Son enquête va lui faire découvrir l'horreur d'une opération qui fut menée de bout en bout par la police française (sous les ordres du préfet René Bousquet) et qui coûta la vie à treize mille juifs, hommes, femmes et enfants, déportés dans des conditions terribles à Auschwitz.
Au cours de ses investigations, Julia découvre que ses beaux-parents se sont installés dans leur bel appartement du Marais début août 1942, appartement occupé auparavant par la famille Starzynski dont la petite fille s'appelait Sarah ... La famille entière a été victime de la rafle. La courageuse jeune femme n'aura de cesse de retrouver la trace de Sarah, menant l'enquête au détriment de son couple et de sa vie de famille, bousculant des secrets enfouis depuis longtemps.
La richesse de ce roman réside dans les nombreux thèmes abordés qui donnent épaisseur psychologique et complexité aux personnages : secrets de famille, relation de couple, devoir de mémoire et honte, sentiment d'être étranger, problème des femmes qui travaillent. Sa faiblesse, de mon point de vue, consiste dans des effets dramatiques à répétition un peu trop lacrymaux ...
Espérons que l'adaptation cinématographique sera à la hauteur avec la magnifique Kristin Scott Thomas !
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dimanche 3 octobre 2010

Léa de Pascal Mercier

Libella-Maren Sell Editions, 2010, couv. J.Doberman/Corbis, 19€
J'avais adoré "Train de nuit pour Lisbonne" du même auteur, paru en 2006 et c'est peut-être pour cela que je n'ai pas accroché d'emblée avec "Léa", parce que j'attendais quelque chose de comparable. Quelque chose de sérieux et en même temps, d'optimiste. Or ce récit de la rencontre entre deux hommes plutôt dépressifs sonne dur. Alors, j'ai préféré mettre de côté momentanément "Léa" que je reprendrai dans quelques temps ...

Amour en cage de Jean Molla

Editions Thierry Magnier, couv. Marion Bataille, 2010, 9.90€
Amour en cage rassemble 13 nouvelles dont le point commun est l'affection ou l'empathie vis à vis de l'autre qu'il soit de la famille ou étranger. Jean Molla joue parfaitement le jeu de la nouvelle, tour à tour il nous surprend, nous émeut ou nous secoue et ça marche très bien. La dernière nouvelle finit sur une citation d'Albert Cohen (le livre de ma mère) en forme d'ode à la littérature :"Chaque homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte. Ce n'est pas une raison pour ne pas se consoler, ce soir, dans les bruits finissant de la rue, se consoler, ce soir, avec des mots."
Encore un excellent recueil de la collection "nouvelles", qui trouvera sa place plutôt en lycée ou auprès des adultes.
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Plan social de François Marchand

Le cherche midi, 2010, 13€
Le titre du roman m'a attirée et je trouvais que l'auteur avait le mérite de situer son roman dans le monde du travail, ce n'est pas si courant.
Cependant, François Marchand écrit une caricature grinçante du monde de la moyenne entreprise dans laquelle il renvoie tout le monde dos à dos : patron, responsable syndical (CGT, comme par hasard), consultant, cadres et ouvriers. Tous suivent leurs motivations personnelles, intérêts matériels ou idéologiques, sans état d'âme quant aux conséquences de leurs actes. Il n'y a aucun personnage positif et du côté des femmes, c'est le désert. Dans cette description désespérante, que la banque d'affaires se nomme "Crotale et Chacal" et les sociétés de climatisation "Gèlefion" et "Burnefraîche" a fini par m'achever totalement et c'est à toute vitesse que j'ai fini ma lecture, en diagonale.
Cette description très noire enlève tout espoir et dans une période de régression sociale où les combats ont bien du mal à déboucher, c'est particulièrement difficile à supporter. Par mesure sanitaire, continuez à croire en quelque chose, évitez le roman et continuez à aller manifester pour défendre vos droits !
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La rêveuse d'Ostende d'Eric-Emmanuel Schmitt

Le livre de poche, ill. Léon Spilliaert, 2007, 6.50€
Au centre de kinésithérapie où je me rends 3 fois par semaine, il y a peu de lecteurs. On les remarque tout de suite : dans le box du praticien, ils ne quittent pas leur livre et, de semaine en semaine, les ouvrages s'enchaînent. D'entrée, on se sent en pays de connaissance, une certaine complicité se noue et je remercie infiniment la lectrice qui m'a suffisamment fait confiance pour me prêter "la rêveuse d'Ostende", même si mon avis est mitigé.
La rêveuse d'Ostende rassemble 5 nouvelles dont la première donne son titre au recueil. L'auteur écrit bien, très bien, et disons le, trop bien. Le style est si léché, l'histoire coule tellement de source qu'on n'a plus grand chose à attendre, à découvrir et nulle surprise ne nous cueille au détour d'une page ! Quelle frustration pour le lecteur, on a envie de dire : allez, travaille moins tes textes, lâche un peu et embarque nous ! Heureusement, passé les deux premières nouvelles, on se laisse enfin prendre par "la guérison" et "mauvaises lectures" ...
Ouf !
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dimanche 26 septembre 2010

Les Willoughby de Lois Lowry

L'école des Loisirs, coll. neuf, 2010, 10€50
Les parents de Timothy, Barnaby A, Barnaby B et Jane n'ont qu'une idée : s'occuper le moins possible de leurs enfants et, si possible même, s'en débarrasser ! De leur côté, les enfants n'ont aucune affection pour une mère qui leur préfère le chien et pour un père qui ne s'intéresse qu'à son journal ! Les parents abandonnent les 4 enfants à une nounou inconnue, recrutée une demi-heure avant leur départ en voyage. Et ce n'est pas tout, dès le lendemain, des acheteurs viennent visiter la maison ! Mais, si la maison est vendue, où iront les enfants Willoughby ? Nos 4 loustics, loin de se laisser abattre, vont faire face à la situation avec l'aide de Nounou, une femme affectueuse, pleine de ressource et, par ailleurs, excellente cuisinière, ce qui ne gâche rien ...
Lois Lowry nous fait fondre avec ce petit roman, pastiche des romans populaires du 19e siècle à la Dickens  mâtiné d'humour (il y a d'ailleurs, en fin de roman, une bibliographie des romans anglophones du 19e avec des enfants pour héros). Des personnages à la fantaisie toute britannique et un rythme bien soutenu garantissent un très bon moment de lecture.
L'auteur nous montre toutes les facettes de son talent en illustrant son livre elle-même, avec beaucoup de fraîcheur.
Dès 10 ans, jusqu'à 12 ans et bien plus, comme d'habitude !
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samedi 25 septembre 2010

Totale angoisse de Brigitte Aubert

couv. Marion Bataille, Éditions Thierry Magnier, coll. nouvelles, 2009, 9€50
J'ai eu beaucoup de plaisir à lire ces 10 nouvelles dont toutes racontent un moment de stress extrême vécu par le héros. Chacune est très construite et déroule, crescendo, en première partie un sentiment différent : la méfiance, l'hostilité, une peur universellement répandue (être oublié par ses parents, rater son avion, rencontrer un psychopathe, ...), le dégout de la violence, l'instinct de survie ... Puis, un élément fait basculer la situation et la chute est toujours habilement amenée, parfois surprenante parfois attendue, la plupart du temps ponctuée d'une pointe d'humour. Brigitte Aubert nous offre un joli recueil à la lecture fluide et aisée. J'ai aimé particulièrement "une oreille absolue" et, dans le style fantastique, "Horroad movie".
J'avais déjà lu 2 très bons recueils dans la collection "Nouvelles", dirigée par Mickaël Ollivier (auteur lui-même) : "la revanche de l'ombre rouge" et "faire et défaire".
Une collection à suivre ...
Pour tout âge, très bien en collège à partir de 14 ans.
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mardi 21 septembre 2010

Peau d'âne de Baudoin

Bande dessinée, Gallimard, coll. Fétiche, 2010, 13€90
Un père raconte à sa fille l'histoire de Peau d'âne. Les rêves de l'enfant, les dialogues père-fille et le conte lui-même alternent, embrouillant un peu le récit et limitant l'ouvrage à des lecteurs déjà experts. Ou alors, il faut lire le livre à l'enfant en lui donnant des explications.
Le dessin, cerné de noir, donne un effet de lourdeur et les couleurs sont vives. J'ai bien aimé mais cela reste résolument une question de goût personnel ...
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samedi 18 septembre 2010

Le petit prince, adaptation de Joann Sfar

Bande dessinée, Gallimard, coll. Fétiche, 2008, 19€
Je n'ai pas dépassé la page 30 de cette adaptation BD de l'œuvre de St Exupéry. Vaincue par l'ennui. Ni le découpage du récit ni le dessin ne fonctionnent !
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Being de Kevin Brooks

Editions du Rouergue, doado noir, 2008, 15€
Comment peut on définir l'humanité, le fait d'être un humain ? Voilà le thème central de "Being", déjà abordé dans le film culte de Ridley Scott "Blade runner".
Robert Smith n'aurait jamais dû se réveiller en pleine fibroscopie, entouré d'hommes armés qui veulent le garder car les médecins viennent de découvrir qu'il n'est pas physiologiquement humain. Seize années de foyers, de familles d'accueil et de galère vont aider l'adolescent à échapper à ses poursuivants. S'il n'est pas humain, qu'est-il, d'où vient-il et pourquoi pense-t-il et ressent-il tout comme un humain ? De la SF, de la psychologie et un très beau style. J'ai adoré.
A partir de 14 ans.
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Comment se débarrasser d'un vampire amoureux de Beth Fantaskey

Editions du Masque, 2009, 16€
J'ai passé un bon moment avec ce roman sans prétention. Vous n'y trouverez pas de la grande littérature, pas de grandes intentions mais un récit bien sentimental, bien haletant et, dans le paysage vampirique actuel, assez original. Comme il est bon de se laisser aller parfois à la facilité !
A partir de 13/14 ans, pour les "aficionadas"
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Là où vont nos pères de Shaun Tan


Dargaud, 2008, 15€
"Là où vont nos pères" est une bande dessinée très forte qui allie dessin délicat et contenu humaniste. Shaun Tan raconte l'émigration de façon intemporelle et universelle. Son coup de génie est de nous associer à la découverte d'un pays d'accueil totalement imaginaire où tout nous surprend comme le héros, nous demande à nous aussi, lecteur, un effort de compréhension. L'écriture, la nourriture, les moyens de transport, les animaux, les habitudes, tout est étrange ; quant à la langue, l'album est sans texte : nous devons faire l'effort d'analyser l'image ! Alors, nous comprenons combien un regard chaleureux, un sourire, une main tendue, une explication patiente, un moment partagé peuvent aider quand on vient d'ailleurs !
Très bel album à une époque où il ne fait pas toujours bon être un étranger ...
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samedi 11 septembre 2010

Vango de Timothée de Fombelle

ill. Blexbolex, Gallimard Jeunesse, 2010,  370 p., 17€

C'est mon fils Olivier qui m'a offert "Vango" pour mon anniversaire. Un grand merci Olivier ;o)

Nous ne savons rien des origines de Vango, arrivé sur l'île italienne de Salina, un soir de tempête avec sa gouvernante, Mademoiselle. Lui non plus car Mademoiselle jure être victime d'amnésie. Mais Vango sait qu'il est poursuivi et qu'on en veut à sa vie. Le beau solitaire fuit en permanence et échappe à tous les traquenards, aidé de quelques amis fidèles !
Très beau récit romantique mêlant mystère, action et amour. Timothée de Fombelle pose ses mots délicatement dans un bruissement d'ailes, une pluie d'étoiles et 4 notes de musique et ce faisant, tantôt il nous surprend, tantôt il nous émeut sans temps mort, sans répit ... Peu d'auteurs savent aussi bien mêler poésie et action.
L'auteur de Tobie Lolness (prix Tam-Tam, prix Lire au collège, prix Sorcières etc.) nous captive à nouveau avec ce récit dont on attend la suite avec impatience.
Indispensable, pour tous à partir de 13 ans.
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jeudi 2 septembre 2010

Amour, impératif et pistolet d'Hubert Ben Kemoun

La collection "Petite poche" chez Thierry Magnier nous réserve quelques délicieux moments de lecture. En collège, elle permet à des enfants qui lisent peu ou qui se laissent impressionner par le nombre de pages, de s'aventurer en confiance vers la lecture. Une fois qu'ils y ont goûté, ils y reviennent ...
"Amour, impératif et pistolet" réussit le tour de force de nous faire rire en racontant deux histoires d'amour, une leçon sur l'impératif et une prise d'otage, en 47 pages seulement !
La maîtresse fait une leçon sur l'impératif et le héros, fou amoureux de Pauline, attend de savoir si c'est réciproque quand soudain, un preneur d'otage fait irruption dans la classe ... Contentez vous de ça et courez lire "amour, impératif et pistolet" pour 5€ !
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dimanche 29 août 2010

Là haut vers le nord de Joseph Boyden

Le livre de poche, 2010, 6.18€
Ce recueil de nouvelles est organisé en 4 parties, correspondant aux quatre points cardinaux.
Les blancs ont tout pris aux indiens Cree : leur culture en mettant leurs enfants de force en internat, leurs terres qui assuraient leur subsistance, leurs croyances en leur imposant leur religion et pour finir, leur fierté. Il leur reste si peu que nombreux sont ceux qui tombent dans la dépression, la délinquance, l'alcoolisme ou la
drogue …
Joseph Boyden décrit admirablement le quotidien désespéré des indiens à travers ces 13 nouvelles et nous montre qu'ils parviennent à retrouver leur dignité quand ils reviennent vers leurs croyances ancestrales et leur identité culturelle.
Les nouvelles, souvent sombres, laissent quand même une place à l'humour dans « La faute de Jenny Two Bears » et « Kumamuk ». Les personnages ont tous conservé, au fond d'eux même, un attachement à leur identité indienne et Langue Peinte, Dink, Joe Cul-de-jatte, Sylvina restent profondément humains malgré leur dérive ...
Un très beau chant qui laisse une petite place à l'espoir et permet d'en savoir plus sur la vie des indiens d'aujourd'hui !
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dimanche 22 août 2010

La voleuse de livres de Markus Zusack

couv. Jeff Cottenden, Pocket, Livre de poche, 2007, 7.50€
 Merveilleux livre qui nous emporte dans une période tragique mais nous berce d'émotions … Tout d'abord un peu déconcertant, le récit, mené par la mort en personne, conte l'histoire de Liesel Meminger, jeune allemande de 11 ans. Son père, communiste, a disparu et sa mère, dans un dénuement total, doit confier Liesel à l'aide sociale. Elle aurait pu plus mal tomber la petite Liesel, car, dans son malheur, elle est adoptée par la famille Hubermann, une famille au grand coeur. Une nouvelle vie va commencer malmenée par la guerre et le nazisme mais bercée d'affection. L'amour des mots et des livres qui sera favorisé par ses parents nourriciers, conscients que l'enfant a besoin d'exprimer sa souffrance, ne la quittera pas. Il lui permettra de nouer des amitiés indéfectibles, précieuses en ces temps de guerre, de celles qui permettent de résister... Un livre magique par le style, car la réalité, la nature environnante ne sont parfois qu'un point de départ pour un dérapage dans le rêve et l'imagination, ils sont transfigurés par les sentiments de la jeune fille. Ce procédé, en créant une réelle ambiance, permet de donner de la force à ce qu'elle ressent. J'ai trouvé son pendant cinématographique dans les films de Jean-Pierre Jeunet, le fabuleux destin d'Amélie Poulain par exemple. J'ai adoré.
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L'origine de la violence de Fabrice Humbert

Editions le passage, Livre de poche, 2009, 6.65€
A l'occasion d'un voyage scolaire au camp de Buchenwald, un jeune professeur français découvre une photographie où figure un déporté dont la ressemblance avec son propre père est époustouflante. Intrigué, il commence des recherches sans aide ni encouragement d'une famille bourgeoise et peu diserte. Cependant, sa fascination pour la violence, ses propres pulsions constituent un moteur déterminant qui le mènera jusqu'à l'élucidation complète de ce lourd secret familial. Et, comme toujours, la parole réussira à tisser des liens jusque là inexistants … Ce roman mêle habilement destin individuel et histoire des hommes, sentiments personnels et détresse collective. Les plongées dans l'introspection ne sont jamais vaines et le regard se distancie au bon moment, évitant les longueurs. Très documenté et parfois même érudit sans jamais être ennuyeux, il constitue une belle pierre dans la construction de la mémoire collective de l'holocauste.
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La shampouineuse de Xi Yang

Éditions Bleu de Chine, collection Chine en poche, 2003, 4.00€
Ce joli livre, en tout petit format et 97 pages, nous raconte l'histoire toute simple de Dong Ping, modeste employé des pompes funèbres qui se reconvertit dans la vente de pop corn par amour et connait avec Chunzi, la shampouineuse, un amour de courte durée mais profond. Au détour de cette histoire, on découvre de nombreux aspects de la vie quotidienne en Chine, parfois surprenants parfois touchants. Tous deux aspirent à connaître les États Unis (la soeur de Dong Ping y est mariée). Pour eux, l'Amérique reste le symbole d'une vie meilleure. Il serait intéressant de savoir si cette idée est commune à tous les chinois ... Pour les amoureux de l'Asie !
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La longue route de sable de Pier Paolo Pasolini

Erléa, collection l'étrangère, 1999
Début juin 1959, Pasolini part seul en voiture de Ventimille à Trieste, en suivant la côte italienne. Ces notes de voyage nous livrent ses impressions personnelles. Ce qui frappe dans ce très beau texte, c'est la prédominance, chez Pasolini, du visuel, des couleurs, des contrastes, de la disposition des lieux. Souvent les premiers mots sont comme un long regard presque photographique sur le paysage, soulignant la beauté, les défauts ou les éléments intéressants. Puis vient l'humain, omniprésent, observé et décrit avec beaucoup de bienveillance mais sans concession. Le style est concis, précis et évocateur. A chaque page, on sent l'amour de son pays, il y a une très belle description de la Spezia page 21. Pasolini ne se noie pas dans les détails inutiles, il va à l'essentiel de ce qui attire son œil de cinéaste et ce qu'il nous transmet nous touche profondément, nous émeut parfois. Vraiment un très beau texte du cinéaste né en 1922 et assassiné sur une plage d'Ostie en 1975.
Le livre est épuisé pour le moment.
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Manuel du puceau de Riad Sattouf

L'association, collection Espôlette, 2009, 11.40€
Cette courte BD conte les affres d'un adolescent mâle lambda, travaillé (entre autres) par ses pulsions sexuelles. Avec délicatesse, beaucoup d'humour et d'auto dérision (on comprend très vite que Riad Sattouf fait appel à son propre vécu) l'auteur campe, au travers d'anecdotes, le portrait d'un ado type et de ses problèmes oh combien foisonnants : angoisses face à ses pulsions, face à des adultes dont il ne comprend pas toujours le comportement, à des interdits et des non-dits qui l'inhibent, au regard des autres qui le paralyse, à l'injustice de la nature qui rend certains boutonneux etc. Dans la même veine que son film « les beaux
gosses », Riad Sattouf réussit un joli tableau de l'adolescence et nous rappelle, avec un clin d'œil en fin d'ouvrage, qu'on arrive à surmonter cette difficile épreuve ! Le dessin, sobre, donne l'impression d'être
« retenu » et participe à faire de cette BD un très bon moment de lecture.
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Les âmes croisées de Pierre Bottero

Rageot, 2010, 15.20€
Au fil de ses livres, Pierre Bottero a tissé des liens avec ses lecteurs, il a créé des repaires communs tout en faisant naître pour nous des mondes imaginaires. Et lorsqu'on découvre de nouveaux héros, il nous semble déjà les connaître un peu ! Ce qu'il nous montre, hormis des mondes dont il dénonce les injustices et qui trouvent un écho dans le notre bien sûr, ce sont des êtres intemporels qui nous ressemblent, qui se cherchent et qui, pour se construire, ont besoin des autres. Un très beau passage dans les âmes croisées, démonte le sentiment de culpabilité qui n'est souvent qu'une façon de se mettre au centre des choses en évinçant les autres. Pierre m'a, à nouveau, embarquée en un tour de ligne, dans le monde de son héroïne Nawel, si proche et en même temps si loin de nous. J'ai suivi complètement captivée ses aventures d'aspirante, puis son apprentissage de combattante et ses batailles avec elle même, sa famille et ses ennemis. Nawel c'était un peu moi, ses réflexions, ses sentiments, les miens. Que demander de plus à un roman ? Littérature jeunesse ? Littérature tout court ! Pierre, tes héros et tes mondes fantastiques nous manqueront comme peuvent nous manquer des amis ...
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Libérer Rahia de Yaël Hassan

Casterman, coll. Feeling 2010, 7.60€
Rahia, 13 ans, est marocaine ; elle désire aller en France pour faire des études et aider sa famille à sortir de la misère. Blandine obtient de ses parents de l'emmener avec eux quand ils rentrent à Paris, en échange d'un peu de ménage. Mais rien ne se passe comme prévu … Yaël Hassan a écrit ce petit roman sur le thème de l'esclavage domestique et place ses héros, trois adolescents, en situation de dénoncer des personnes proches, obligation morale des plus difficiles à accomplir. Quel sera leur choix ? Ecrit dans un style simple et très compréhensible dès la 5e, il offre une réflexion intéressante pour les élèves de collège.
J'ai mis ce petit roman dans la sélection du Prix du Livre Jeunesse de Marseille et la classe de 5e qui y participe cette année a bien aimé !
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Une sonate pour Rudy de Claire Gratias

Syros, 2OO6, 10.65€
Nicolas vient d'emménager dans un appartement prêté par un ami de son beau-père. Habitué à la vie en maison individuelle, il a du mal à s'y faire. Sa mère, harassée de travail et son beau-père en difficulté financière sont peu présents. Pour couronner le tout, dans sa nouvelle classe de 3ème, Dylan terrorise les élèves grâce à sa force physique et fait régner sa loi. Même les surveillants en ont peur. Dylan frime devant Marie, la plus jolie fille de la classe. Tout bascule le jour où Marie commence à faire attention à Nicolas, Nicolas le musicien, le flûtiste … Claire Gratias raconte, avec la précision et la justesse du vécu, la violence en milieu scolaire, la lâcheté collective, l'aveuglement des adultes et finalement, l'irruption du drame. Quel enseignant ne s'est jamais trouvé confronté à ce problème ? Il y a certains élèves qu'il faudrait punir constamment et avec ceux-là, on fait « la part des choses » et on s'en tient à ...punir l'inacceptable seulement. Ces élèves là imposent aux autres leur loi et font régner la peur. Mais comment les « tenir » quand les parents sont absents ? Claire Gratias mène le récit sous la forme d'un cahier de souvenirs écrit par Nicolas et nous fait partager avec beaucoup de sensibilité et de finesse sa plongée dans l'insoutenable, les humiliations, le harcèlement et la peur. Un récit « coup de poing » qui fait réfléchir. Le sens du titre nous est révélé dans les dernières pages même si on a commencé à deviner.
A partir de 13 ans.
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Le livre noir des secrets de F.E. Higgins

Pocket Jeunesse, 2008, 18.05€
Londres au 19e siècle. Ludlow Fitch vit dans le misérable quartier de la City. Ses parents, qui ont toujours besoin d'argent pour s'adonner à la boisson, lui ont appris à devenir un habile pickpocket . Les voilà qui s'apprêtent à lui faire arracher toutes les dents pour les vendre ! Ludlow comprend vite qu'il doit fuir sans attendre et, après quelques péripéties, se retrouve par hasard dans le morne village de Pagus Parvus. Drôle de nom pour un drôle de village ... A point nommé, il y fait la connaissance de Joe Zabbidou et aide ce prêteur sur gages très particulier. En effet, Joe Zabbidou achète ... les secrets les plus terribles des habitants du village et Ludlow les consigne pour lui dans le « livre noir des secrets ». L'activité du prêteur sur gage contrarie amplement les manigances du cruel Jérémiah Ratchet, le potentat local, car, en achetant les secrets, il aide financièrement les habitants … Mais, en réalité, qui est vraiment Joe Zabbidou ? Une histoire originale et bien ficelée, au rythme endiablé, servie par un style élégant et assaisonnée d'un zeste d'humour et de finesse psychologique ; voilà qui garantit un excellent moment de lecture où chacun, de 10 à 14 ans (et plus pour les amateurs), trouvera son plaisir. A conseiller sans modération.
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Sur les traces de Siri Aang de Cristina Kessler

Flammarion, 2008, 12.35€
Namelok, adolescente massaï, a 12 ans et vit au Kenya. Élevée dans la tradition, dès qu'elle aura ses premières règles, elle devra être initiée (comprendre, entre autre, excisée) pour devenir femme selon le rite et se marier. Pour elle, il n'y aura pas d'école. Mais l'adolescente, malgré son éducation, se pose beaucoup de questions et l'irruption d'autres pratiques dans l'univers massaï vont l'amener à s'opposer partiellement à cette tradition … Je n'ai pas adhéré totalement à l'histoire, en partie par manque d'intérêt pour le sujet (malgré un effort de documentation de l'auteur qui a vécu 19 ans en Afrique et a été aidée par « un ami massaï ») et en partie parce que le récit, à mon goût, est parfois trop répétitif ou poussif. Je crois que l'auteur a voulu traiter trop de sujets à la fois: respect de la nature, mode de vie des massaï, perturbations dues à l'irruption des autres cultures, pauvreté, oppression des femmes etc. Ceci enlève, hélas, sa force à ce vivant plaidoyer pour le peuple massaï.
A réserver à des ados (5e/4e) intéressés par le sujet.
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lundi 16 août 2010

L'histoire de Clara, album de Vincent Cuvellier

L'histoire de Clara, album de Vincent Cuvellier ill. de Charles Dutertre, Gallimard Jeunesse, Giboulées, 2009, 12.85€

Par un beau matin ensoleillé, la famille de Clara se rend au jardin d'acclimatation. Cette sortie rend son frère et ses deux sœurs profondément heureux mais ils doivent à tout prix respecter la règle rappelée par leur père : « dehors, nous devons être transparents, gris comme les murs ... ». En effet, nous sommes en pleine période de l'occupation et « nos ombres étaient plus audacieuses que nous, la tête haute, le corps en avant, la démarche volontaire. Oui, mais elles ne portaient pas d'étoiles jaunes, elles ! ». A leur retour à la maison, les allemands raflent toute la famille, la mère a juste le temps de glisser le couffin contenant Clara dans l'ascenseur. Le bébé sera recueilli par une vieille voisine qui la confie aux religieuses du quartier … A partir de là, les péripéties s'enchaînent et les narrateurs diffèrent à chaque chapitre : ce sont les personnes qui ont recueilli, à un moment donné, le bébé et s'en sont occupé. Malgré les dangers, les difficultés et la peur, chacun puise au fond de lui même encore suffisamment d'humanité et d'empathie pour aider la petite et lui permettre d'échapper aux antisémites. La personnalité de chacun ressort à travers le récit qui s'attache aux détails, aux petites choses, aux difficultés matérielles. Et c'est de cette opposition entre peur, difficultés et tendresse que Vincent Cuvellier fait naître l'émotion. Le dessin aux contours tremblés, aux couleurs tendres de Charles Dutertre ajoute une touche de douceur et souligne l'ambiance d'insécurité de l'époque. De cette histoire réaliste (on pense au récit autobiographique de Claude Moscovici « voyage à Pitchipoï »), un optimisme tranquille se dégage qui donne foi, et cela fait du bien, en l'être humain. Grâce à tous ces personnages, plus ou moins sympathiques et aux préoccupations bien différentes, Clara survivra et la fin nous réserve un joli retournement de situation dont une ritournelle constitue le fil conducteur. Cet album s'adresse à tous, à partir de 8 ans … porté par son langage, celui de la tendresse, il est universel !
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samedi 14 août 2010

La couleur des sentiments de Kathryn Stockett

Editions Jacqueline Chambon, Actes Sud, 2010, 23,80 €

Beau roman sur l'exploitation des bonnes noires dans les familles blanches du Mississipi pendant les années 60, années qui connurent à la fois l'apogée puis le lent, trop lent déclin de la ségrégation raciale.
Une jeune blanche, Miss Skeeter, revient dans la plantation familiale (de coton) après avoir fini ses études et apprend que Constantine, la bonne noire qui l'a élevée, a quitté la maison sans laisser de trace. Motivée par une affection profonde pour cette femme qui s'est occupée d'elle avec amour, Skeeter décide de rassembler des témoignages sur les conditions de travail des bonnes. Ces témoignages nourriront des articles qui lui permettront, espère-t-elle, de faire ses débuts dans le journalisme.
Après un démarrage difficile dû à la peur des représailles de la part des patronnes, les témoignages affluent grâce à l'aide d'Aibeleen (bonne d'une des meilleures amies de Skeeter) et Minny. A travers eux, la jeune blanche de milieu aisé, prend conscience de l'étendue des injustices et des humiliations faites à ces femmes. Au fil des témoignages, une amitié va se nouer entre toutes les 3 ...
Parfois drôle, parfois émouvant, le roman nous offre de très beaux portraits de femmes d'un grand courage.
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lundi 9 août 2010

Le collège des princesses de Shannon Hale

Gallimard, folio junior n°1509, 7.25€

Il est dommage que la 1ère de couverture du roman, assez fade, n'en rende pas l'ambiance, finalement plus faite d'action que d'introspection.

« Le collège des princesses » raconte le passage de Miri à l'âge adulte. Cette jeune montagnarde de 14 ans qui doute terriblement d'elle-même, doit quitter sa famille et son village pour apprendre à devenir l'épouse du futur roi. Toutes les filles du village ayant plus de 12 ans et moins de 18 ans vont suivre l'apprentissage dur mais avisé de Mme Oleana, apprentissage qui leur servira dans les situations les plus dramatiques.

Miri, d'abord en révolte contre la dureté d'Oleana, va ensuite exploiter à son avantage les ressources de cet enseignement et en faire profiter ses compagnes. Elle va découvrir le langage secret des carriers, la valeur du
« lindor », la pierre que les montagnards de son village sont les seuls à savoir extraire et cultiver sa ténacité et son intelligence. Elle va prendre confiance en elle, œuvrer à améliorer les conditions de vie de son village et amener ses compagnes à découvrir la valeur de la solidarité.

Très beau roman initiatique, plein d'énergie, d'optimisme et de chaleur humaine, avec parfois un zeste de fantastique. L'amour y est aussi présent !

Le vocabulaire recherché et le style parfois très imagé en fait un roman à réserver aux 4e et 3e.
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Un endroit pour vivre de Jean-Philippe Blondel

Actes sud junior, 2007, collection "d'une seule voix", 7.45€

C'est un petit roman de 77 pages qui se dévoile tout doucement, en petites touches et nous entraîne insensiblement dans le monde de son héros, un monde tout en sensibilité et en écoute de l'autre. Nous ne connaîtrons pas son prénom et pourtant nous saurons beaucoup de lui, grâce à un portrait tout en finesse. Un portrait d'adolescent qui cherche son identité et pour qui les choix du nouveau proviseur, adepte de l'autorité et de la réussite à tout prix, vont jouer le rôle de révélateur. Jean-Philippe Blondel a l'immense qualité de savoir faire monter l'émotion jusqu'à laisser le lecteur submergé par elle (j'ai eu les larmes aux yeux plusieurs fois). Son style simple laisse avec délicatesse toute la place aux sentiments suggérés. Cependant, ne croyez pas que vous avez à faire à un court fleuve tranquille, il est beaucoup question d'amour et les rebondissements de la fin vous surprendront !

Un pur bonheur de lecture pour tous et bien sûr, particulièrement pour les adolescents à partir de 15 ans.
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L'amour est une île de Claudie Gallay

Actes sud, 2010, 20.75€
Odon Schnabel, metteur en scène, dirige le théâtre du chien fou à Avignon. Marie Selliès est la soeur d'un auteur de théâtre. Un jeune auteur qui s'est suicidé par manque de reconnaissance. Marie veut rencontrer l'homme à qui son frère avait envoyé son texte et qui lui a répondu trop tard pour empêcher son suicide, scellant ainsi son destin. Elle veut remonter jusqu'à ce dernier lien avec son frère dont elle n'accepte pas la mort.
De la rencontre âpre entre ces deux êtres en souffrance (sur fond de grève des acteurs et techniciens du festival) nait une réflexion sur les hasards qui déterminent nos vies, sur l'incapacité à surmonter sa solitude et sur la culpabilité. Un livre dur donc et qu'il m'a fallu lire jusqu'à sa moitié pour savoir s'il me plaisait ou non … mais, cette fois encore, le style de Claudie Gallay m'a touchée et m'a emportée jusqu'au bout de l'histoire. Dépouillé, simple, il nous mène à l'essentiel, au sens profond du texte qu'il nous sert dans toute sa force en faisant naître l'émotion. Il va droit à l'âme.
Attention, ce n'est pas une lecture anodine : à mettre de côté pour un moment où l'on n'est pas trop fragile !
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La lamentation du prépuce de Shalom Auslander

10/18, domaine étranger, 2008, 7.80€

Ce roman vous amusera ou vous lassera rapidement, selon votre sensibilité de lecteur.
Shalom Auslander y raconte son passage de l'enfance à l'âge adulte, avec les perturbations déstabilisantes de l'adolescence, sur fond de famille juive américaine pratiquante et de père alcoolique.
Encore une histoire de famille, de règlement de compte avec les parents mais celle-ci présente la particularité de dénoncer l'emprise omniprésente d'une religion qui s'immisce dans chaque acte du quotidien dans un milieu étouffant. L'auteur s'insurge contre un dieu sévère et implacable qui exerce sa dure loi sur les hommes, les humilie régulièrement et les punit implacablement. Ce qui donne lieu à des pratiques proches de la
superstition !
Avec beaucoup d'humour, il s'adresse à Dieu directement comme s'il s'agissait entre eux d'un règlement de compte personnel. On apprend beaucoup sur la religion juive et sur les pratiques, de la prière qu'on envoie sur internet et qui moyennant finance sera glissée dans une anfractuosité du mur des lamentations au petit job de « veilleur de mort » où on remplace les familles qui ne peuvent accompagner leurs proches …
On retrouve dans l'itinéraire de Shalom Auslander beaucoup d'ingrédients universels, y compris les reproches faits à la religion, quelle qu'elle soit, appliquée avec trop de rigueur : hypocrisie, contradictions diverses entre le dogme et la pratique, ridicule de pratiques dépassées, souffrances infligées inutilement, angoisses diverses et surtout culpabilité !
Mais au bout du compte, après maintes interrogations, l'auteur fera circoncire son fils et continuera à s'adresser à Dieu quotidiennement : on ne peut se débarrasser si facilement des croyances qui ont imprégné l'enfance …
Les dialogues hilarants, les situations comiques, les monologues pleins d'interrogation et les réflexions sur la religion vous amuseront ou vous lasseront, selon votre humeur et vos goûts de lecteur.
A essayer puisqu'il est édité en poche !
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J'ai saigné (1938) de Blaise Cendrars

classiques et cie Hatier poche, 2009, 3.40€
Blaise Cendrars, auteur et narrateur, fut amputé du bras droit en 1915, lors de la 1ère guerre mondiale, en Champagne.
Le récit commence immédiatement après son amputation. Après un transport inconfortable et douloureux dans la panique générale (un des blessés en mourra), il atterrit, grâce à l'idée du chauffeur, à l'hôpital Sainte Croix à Châlons-sur-Marne. Les infirmières et les médecins font leur possible, chacun à sa façon. Mme Adrienne P, infirmière major, est une femme exceptionnelle, aimée de tous les patients auxquels elle donne toute son énergie. Elle demande à Cendrars de distraire un jeune landais, terriblement blessé. Et un jour arrive un haut gradé qui prétend s'y connaitre mieux que tous ...
Cendrars dénonce l'inhumanité de la guerre, les souffrances infligées aux hommes et le bouleversement qu'elle amène dans la vie de chacun. Il dénonce aussi la dureté de cœur des hauts-gradés.
Le texte est parfois insoutenable car les descriptions précises en rendent la cruauté encore plus terrible. Ce texte publié en édition scolaire me paraît bien trop dur pour les collégiens.
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Un long chemin vers la liberté de Nelson Mandela

Le livre de poche, 1995, 8.55€
C'est l'histoire d'une vie qui rejoint totalement l'histoire d'un pays, l'Afrique du Sud et l'histoire de la lutte pour un idéal : l'égalité des droits. Nelson Mandela raconte comment il a pris petit à petit conscience de la situation des noirs dans son pays, comment au fil des rencontres il a compris (avec ses camarades) qu'il devait lutter pour les droits des noirs en faisant abstraction des notions traditionnelles de clan et en faisant de l'ANC le point de ralliement de toutes les forces progressistes. Certains passages sont poignants, par exemple quand il raconte la première fois où il a pu toucher la main de sa femme en prison, après plus de 20 années de séparation ou les anecdotes toutes simples sur la vie quotidienne à Robben Island.
Le livre a été visiblement écrit avec, toujours en tête, l'idée qu'il faut permettre aux noirs et aux blancs, qui se sont antérieurement affrontés, de vivre en paix maintenant et de construire l'avenir du pays. On comprend que la grande mansuétude dont fait preuve cet homme, emprisonné pendant plus de 25 ans, est très pragmatique.
Ce récit, entièrement autobiographique, dévoile un homme profondément humain et extraordinairement déterminé mais aussi pleinement conscient de ses responsabilités et de son rôle exceptionnel. Au-delà de l'avocat capable d'une analyse politique extrêmement fine et stratégique, il révèle l'homme qui s'est parfois interrogé sur le sacrifice de sa vie personnelle et notamment son absence auprès de ses enfants et de sa famille.
A lire quand on est découragé de voir dans quel monde on vit et ce que nous réservent nos instances politiques : on est devant une lutte à laquelle seuls le long terme et la détermination ont permis de triompher.
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Shutter Island de Dennis Lehane

Rivages Casterman noir, 2008, 7.60€
Avec Shutter Island, j'ai fait une erreur de néophyte. J'ai vu l'adaptation cinématographique de M.Scorcese avant d'avoir lu le roman, que j'ai lu, de plus, dans la foulée ! Une horreur, de quoi vous couper l'envie de lire dès les premières pages. Pourtant, après quelques efforts, j'ai avalé le roman sans coup férir et même avec une certaine fébrilité. C'est dire s'il est prenant.
Le marshal Teddy Daniels et son coéquipier Chuck Aule débarquent sur Shutter Island pour enquêter sur la disparition de Rachel Sollando, une "détenue-patiente" de cet hôpital psychiatrique réservé aux assassins et aux meurtriers les plus dangereux. Nous sommes dans les années 50. Dennis Lehane crée une ambiance proprement étouffante : petit à petit, nous avons l'impression qu'un piège se referme sur Teddy et Chuck ... le personnel médical de cet hôpital opère-t-il des expérimentations sur l'être humain ? Les pratiques vis à vis des patients sont-elles bien éthiques ? Le personnage de Teddy est finement campé et bien approfondi. La fin est par ailleurs assez surprenante ...
Quant à l'adaptation de Scorcese, elle reste fidèle au livre mais laisse planer un doute que le roman écarte sans équivoque à la fin.
A conseiller particulièrement aux amateurs de polars.
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La bâtarde d'Istanbul d'Elif Shafak

10/18 domaine étranger 2007, 7.55€
Armanoush et Asya, l'une américano-arménienne, l'autre turque. Toutes deux sont à la recherche de leur histoire ; la première veut comprendre comment le génocide a pu avoir lieu, la deuxième veut savoir qui est son père (Asya est la "bâtarde" du titre). Toutes deux sont jeunes, cultivées et indépendantes, elles ont beaucoup en commun et de leur rencontre naîtra une amitié et une entraide réelles ainsi qu'un rapprochement imprévu.
Le roman nous entraîne dans une saga familiale complexe où les êtres humains sont ballottés au gré d'évènements qu'ils ne maîtrisent pas, ils sont livrés à la destinée humaine faite de cruauté mais aussi parfois de bonté ! Ils en sont victimes ou bourreaux. On pense, à la lecture du roman, à l'Olympe antique et à ses dieux capricieux menant la vie dure aux hommes ...
Outre la liberté et les droits des femmes dans la Turquie d'aujourd'hui, l'omniprésence de la religion, le rappel du génocide arménien et de son déroulement, c'est aussi son déni actuel par le peuple turc qui est abordé. Avant Mustapha Kémal et la modernisation du pays, la Turquie n'existe pas et tout ce qui est arrivé ne concerne pas les turcs modernes ...
Les premiers chapitres montrent en alternance chacune des filles avec des retours sur le passé de leur famille et j'ai eu un peu de mal à accrocher à ce début foisonnant. Mais, la richesse, la complexité et le nombre des personnages rendent ce roman attachant et vivant.
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84 Charing Cross Road de Helen Hanff

Livre de poche, 5.25€
Après la seconde guerre mondiale, Helen Hanff vivait à Chicago de petits boulots pour la radio américaine. Elle écrivit par la suite des scénarii pour la télé en tirant le diable par la queue. A l'âge de 60 ans, toujours dans le besoin, l'idée lui vint de publier les lettres qu'elle avait échangées avec un libraire londonien entre 1949 et 1965 alors qu'elle cherchait des livres introuvables aux Etats Unis. Et le succès arriva ... Cet échange épistolaire dépeint l'ambiance de l'immédiat après-guerre, les restrictions encore en vigueur à Londres et surtout, nous fait saisir à travers le style des deux protagonistes l'opposition entre le nouveau et l'ancien monde. Helen est familière et son style direct désopilant, le libraire est tout en retenue et finesse.
Beaucoup d'humour, rire garanti.
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mercredi 4 août 2010

Le chagrin du roi mort de Jean-Claude Mourlevat

Gallimard Jeunesse, 2009, 15.20€

Une époque indéterminée, un pays inconnu : Petite Terre. Aleks et Brisco, inséparables, y vivent, pour les habitants ils sont jumeaux. Le jour de ses 10 ans, Brisco est kidnappé et Aleks ne rêve que de le retrouver. Il va bientôt découvrir que Brisco n'est pas son frère tandis que Brisco se reconstruit une vie de l'autre côté de l'océan ... Sauront-ils se retrouver, après quelles épreuves ?
L'écriture délicate et précise de JC Mourlevat sait faire naître l'émotion et sait maintenir l'intérêt mais j'ai trouvé des longueurs dans le récit. Ses héros sont des êtres de chair et de sang, profondément humains dans leurs imperfections et leurs comportements.
J'ai préféré son roman précédent : "le combat d'hiver", un récit très fort, empreint d'universalité : universalité de la lutte contre la dictature, contre l'arbitraire et la cruauté, universalité du sacrifice des héros ordinaires qui parfois perdent leur vie au combat.
A partir de 13/14 ans.
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Le chemin des âmes de Joseph Boyden

livre de poche, 2007, 6.65€

Xavier et Elijah, son ami d'enfance, quittent leur Canada natal pour s'engager dans la première guerre mondiale, auprès des forces alliées. Ils sont indiens Cree et vivent non loin de la baie d'Hudson, près de la rivière Albany, une vie simple basée sur la pêche et la chasse, à l'écart de la civilisation occidentale. Niska la tante de Xavier, les a initiés à la chasse dans le respect de la vie. Ces qualités vont faire d'eux des soldats hors pair.
Tous deux vont connaître l'enfer de la "grande guerre", le front et ses conditions de vie inhumaines, la mort quotidienne qui menace et tue ceux qui ont partagé votre quotidien, l'instinct de conservation qui pousse à tuer le premier. La guerre fait d'Elijah un « capitaine Conan » indien, un individu qui finit par tuer par plaisir alors que Xavier, lui, tue pour se défendre et en souffre. Elijah trouve, comme il le dit, un territoire de liberté qui permet de tuer … jusqu'à la nausée, jusqu'à tuer un enfant et sa mère, jusqu'à prendre les scalps de ses victimes. Il devient tireur d'élite.
Le récit est mené par Niska en alternance avec Neveu (Xavier étant le nom donné par les religieuses qui mettaient, de force, en internat les enfants indiens à cette époque). Les souvenirs de la vieille femme alternent avec ceux du jeune homme, rappelant l'histoire du peuple Cree tout comme l'histoire contemporaine, soulignant le respect de la vie pratiqué par les indiens en contre point à la cruauté occidentale.
Ce livre entre dans la lignée des grands romans antimilitaristes, c'est un magnifique roman.
Un auteur à suivre ...

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Chroniques des temps obscurs de Michelle Paver

tome 1, Frères de loup

Hachette Jeunesse, 5.25€ en poche

Torak vit seul avec son père, loin des autres clans. De lui, il a tout appris, à chasser, à se protéger du froid, à se vêtir. Mais un ours d'une violence extraordinaire tue son père et le voilà seul au monde. Il va devoir affronter la nature et les hommes, découvrir qu'il est "Celui qui écoute", qu'il peut communiquer avec les loups ... Il rencontrera aussi le louveteau qui l'aidera et Renn, la jolie guerrière.
Le récit prend place aux temps préhistoriques, il est bien rythmé et l'attention ne retombe jamais. Les valeurs de solidarité et d'amitié le rendent sympathique. Le tome 6 vient d'être publié.
Très apprécié des 12/14 ans.
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mercredi 21 avril 2010

L'ombre de ce que nous avons été de Luis Sepulveda

Editions Métailié, 2010, 16.15€
Ce livre est le livre de ceux qui « peuvent lire l'existence résumée en deux lignes narratives condamnées à ne pas coïncider : celle de la réalité et celle des désirs. »
C'est le livre des perdants, de ceux qui ont dû s'exiler et qui, lorsqu'ils reviennent dans leur patrie, le Chili, voient leur histoire niée par l'histoire officielle. Il faut oublier la dictature de Pinochet, oublier la violence, oublier les morts, oublier les souffrances et les injustices.
Les 3 amis du roman ont dû s'expatrier, ont roulé leur bosse tant bien que mal sans renier leurs idées et seul l'humour leur a permis de tenir le cap. Ils se retrouvent pour un « coup » dont le lecteur ne saura rien jusqu'à la surprise finale et qui ne peut être que grâce à la solidarité.
Sepulveda reste tendre avec ses rêveurs impénitents (dont il fut), avec ses révolutionnaires passionnés et leurs péripéties souvent cocasses, prétextes à des retours sur l'histoire contemporaine du Chili.
Profondément humain et tendre. A lire absolument.
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jeudi 8 avril 2010

L'apprenti épouvanteur de J.Delaney

Bayard Jeunesse, 12.30€

Thomas Ward est le 7e fils d'un 7e fils. Donc, il possède des pouvoirs ; entre autres, il voit et entend les sorcières, ombres (comprendre fantômes), gobelins et autres créatures surnaturelles.
Son père est fermier mais sa terre échoit à Jack, l'aîné. Quant à Thomas, sa mère a depuis bien longtemps décidé qu'il serait apprenti ... chez l'épouvanteur compte tenu des ses aptitudes. Mais qu'est ce qu'un épouvanteur ? La personne chargée d'éliminer les dangers provenant des forces de l'ombre qui nous entourent. Et il y a du boulot ! Pas de chômage dans ce domaine.
Le style est agréable et coulant, les péripéties s'enchaînent sans temps mort, le héros est sympathique et les méchants sont vraiment méchants, on tremble, on sourit ... Franchement, je me suis régalée. Il existe une suite et le tome 6 vient de paraître.
Plutôt à partir de 12 ans, beaucoup de succès en collège.
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lundi 5 avril 2010

La route de Cormac Mc Carthy, points

 Livre de poche, 6.50€
Assurez vous d'avoir le moral avant de plonger dedans ! Une guerre ou une catastrophe naturelle terrible a mis fin au genre humain en dévastant la terre. Les rares survivants (certains anthropophages) s'entretuent pour quelques boites de conserve et nous suivons un père et son fils dans leur lutte quotidienne contre le froid, la pluie, la neige, le découragement et les "méchants". Complètement désespéré, ce livre est un vibrant appel à la protection de l'environnement mais cela vaut-il le coup, finit-on par se demander après les 248 premières pages ... les 4 dernières tentent de nous en convaincre !
Il faut quand même parler du style que j'aime beaucoup mais je ne sais pas si cela suffit pour vous conseiller ce roman. Il a quand même eu le prix Pulitzer 2007 et a été adapté au cinéma. Je ne suis pas allée voir le film ...
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dimanche 28 mars 2010

Simple de Marie-Aude Murail

 École des loisirs, médium, 10.00€
Un coup de cœur pour ce livre plein de sensibilité et d'humanité ! Édité en collection jeunesse, il pourrait tout à fait figurer en édition adulte. Il n'y a pas d'âge pour lire "Simple". La preuve, toute ma famille l'a lu, de mon beau-père 84 ans à ma fille (elle avait 14 ans, alors) ! Et tout le monde a ri !
Kléber, 17 ans, a un frère aîné, Barnabé. Mais Barnabé n'a que 3 ans dans sa tête, beaucoup d'énergie et de fantaisie. Il ne supporte pas de rester à Malicroix, une institution pour déficients mentaux de tous âges. Alors, comme leur père se remarie et que leur mère est morte, Kléber décide de garder avec lui son grand-petit frère. En colocation, à Paris. La confrontation entre les colocs et Barnabé est hilarante, les quiproquos s'enchaînent, le comique et l'émotion se disputent chaque page.
C'est sans conteste le meilleur livre de Marie-Aude Murail qui sait faire naître l'émotion avec habileté et humanité.
A lire sans retenue à partir de 14 ans ! On peut aussi le lire à des enfants plus jeunes (lecture à voix haute).

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Le pays des marées d'Amitav Ghosh

10/18, domaine étranger, 8.95€
Au nord est de l'Inde, à l'embouchure du Gange et du Brahmapoutre, s'étend la région des Sundarbans, entre terre et mer. Les gens y vivent très pauvrement, de la pêche la plupart du temps. Le gouvernement se soucie plus de la protection de cet environnement exceptionnel (sous la pression internationale des écologistes) que des habitants.
Amitav Ghosh décrit admirablement la mangrove, le mode de vie et de pensée des habitants, leurs croyances. Il confronte la modernité et l'ignorance et il nous montre que les bonnes intentions écologiques vont parfois à l'encontre des intérêts des habitants quand elles sont appliquées sans discernement. Ne jamais oublier les hommes et toujours combattre à leurs côtés !
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Histoire d'un allemand de Sebastian Haffner

Actes Sud, 2004, Babel, 9.05€
Très beau récit autobiographique d'un jeune magistrat protestant qui s'exila en 1938 après la prise du pouvoir par Hitler et ne revint en Allemagne qu'après la fin de la guerre.
Haffner rappelle que la défaite de 1918 fit, dans les esprits allemands, le lit du nazisme. Il décrit la mollesse des partis de gauche, leur incapacité à s'unir. Il excelle surtout à montrer l'indifférence générale qui laisse se propager l'idéologie nazie, la démission au quotidien qui permet à l'injustice et à la cruauté de s'imposer. Cette indifférence se mue progressivement en peur et tandis que certains tentent de fuir, d'autres préfèrent fermer les yeux. Le récit, dans un très beau style, retrace l'histoire allemande de 1914 à 1933 ; il est étudié en lycée en Allemagne. Livre passionnant et effrayant car le parallèle avec notre actualité s'impose au fil de la lecture ...
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Porteurs d'âmes de Pierre Bordage

Lgf, 2007, 6.65€

Imaginez qu'une technique ultra secrète et révolutionnaire permette à votre âme de quitter votre corps pour s'installer momentanément dans celui d'un autre être humain ...
Imaginez que cet autre être humain soit une jeune femme noire, immigrée illégale du Libéria, prostituée à 8 ans, SDF à Paris ...
Imaginez que tous les gouvernements du monde soient à la recherche du lieu où se pratique le voyage extracorporel ...
Imaginez que vous, policier cinquantenaire, blasé et revenu de tout, tombiez grâce à votre intuition sur sa
piste ...
Les 3 héros du livre : Léonie l'immigrée, Edmé le policier et Cyrian le jeune intellectuel à la recherche de sensations extrêmes vont être impliqués dans cette poursuite implacable où, tout comme dans notre société, la vie humaine ne compte plus face aux intérêts personnels des puissants, où l'homme est un loup pour l'homme.
Le rythme est haletant, on ne décroche jamais et nos héros nous mènent jusqu'au bout d'une histoire où l'amour et la cruauté s'entrechoquent.
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